Détail de l'œuvre
  • Karim Forlin (né en 1977, Locarno (Suisse))
  • E, Bisogna entrare da un altro paesaggio
  • 2013
  • fil d'ortie, fil de coton, bois
  • 317 x 107 cm
  • n° inv. 03130

  • crédits photographiques: Serge Fruehauf
  • Programmatique en apparence, avec un abécédaire comme trame, le travail de Karim Forlin suit cependant un principe d’« indétermination ». L’artiste se laisse influencer par ses trouvailles, d’objets ou de paroles, dans un processus intuitif ; il manie des éléments préexistants par associations libres. L’abécédaire – le choix d’une lettre pour prétexter chaque titre de ses projets – est utilisé d’avantage pour se situer en tant qu’artiste, un statut et une définition qu’il questionne en continu, et comme un apprentissage : « combiner des lettres pour ensuite pouvoir écrire ». Il se crée son propre système de référence ; certaines pièces, parfois modifiées, sont transférées d’une exposition à une autre. Le texte occupe également une place importante dans son travail : citations, slogans sous forme de peintures murales ou de titres qu’il puise dans des sources savantes autant que des « wiki ». La construction de ses œuvres n’est pas loin de l'Arte Povera dans une réflexion sur la dialectique entre la nature et la culture. Sa matière première est souvent d’origine naturelle, il y superpose une substance synthétique : la rencontre du bois flotté et d’une peinture laquée, par exemple. Le geste qui intervient sur l’objet est répétitif et entraîne le résultat vers une esthétique Arts & Crafts. Une certaine récurrence apparaît en filigrane du vocabulaire artistique de Karim Forlin : balises de bois dans un motif de quadrillage, juxtaposition de pierres avec peinture signalétique, cordes assemblées pour dessiner un grillage, allusions au cadastre ou au réseau, des éléments qui tentent de poser des jalons, placer des repères, transformer un lieu d’exposition en paysage ou en territoire. Mais que ce soit par le choix de la couleur qui éloigne l’objet de sa fonction, la déformation qui le rend organique, ou par l’utilisation de mots, le fond « ordonné » est dévié vers une ambivalence, source de nouvelles lectures. 

    E, Bisogna entrare da un altro paesaggio (la pièce faisait partie d’une exposition correspondant à la lettre « F », composée également d’une peinture murale et d’une sculpture) s’apparente à une cartographie des entrées de tunnels, têtes de ponts, bouches d’aération, etc. Les structures représentées font partie d'un travail pionnier d'esthétisation des ouvrages d'art autoroutiers imaginé par l’architecte et designer tessinois Rino Tami pour l’autoroute A2 entre 1963 et 1978. Elles sont schématisées et reportées par un procédé de broderie, sur la base de photographies d’amateurs trouvées sur internet. Ce "répertoire", transcrit sur un support tel un parchemin végétal vieilli (support composé de fibres d’ortie trouvé sur un marché aux puces), perd ainsi de sa rigueur. A l’instar d’un précepte poétique, le titre (« il faut entrer par un autre paysage »), emmène la lecture vers une métaphore du passage. (MEK-2016)

Media

Results:  0

No elements available!