L’œuvre de Pascal Berthoud se déploie essentiellement à travers le dessin et la sculpture pratiqués avec une maîtrise digne de la grande tradition. Cela ne le prive pas pour autant de faire des incursions dans des mediums plus typiquement contemporains comme le collage ou la vidéo. Pourtant, son travail s’ancre intimement dans l’époque par la multiplicité de ses références et l’absence de hiérarchie que l’artiste instaure entre elles. A la peinture et l’architecture de la Renaissance se superposent des effets typiquement cinématographiques, à l’imagerie religieuse l’iconographie de la science-fiction, à des suggestions de concrétions géologiques ou de phénomènes météorologiques incertains des représentations fidèles de constructions modernistes et brutalistes faites de béton et d’arêtes. La dualité est à l’œuvre non seulement dans les sources de ces images, mais aussi dans les gestes qui leur donnent forme, balayant d’un bout à l’autre toute l’échelle des gradations entre le classique et le baroque ou, en d’autres termes, entre le stable et l’instable. Et lorsque Pascal Berthoud présente son travail dans des expositions, c’est sous forme d’installations, qui placent en résonnances ses dessins et ses sculptures, ajoutant encore de l’épaisseur à la stratigraphie du sens. 

Les six dessins acquis par le FCAC appartiennent à une série intitulée Vortex, qui se développe depuis 2010 et qui continue un peu comme une histoire en mouvement, nous dit l’artiste. Et de mouvement, c’est précisément ce dont il est question dans ces dessins. Le titre de la série le dit bien, puisque le terme « vortex » est utilisé pour désigner un mouvement tourbillonnaire de fluide ou de particules. Dans la mécanique des fluides, il qualifie un tourbillon creux obtenu lors d'un écoulement au voisinage d'un obstacle, dans celui de la météorologie, un ensemble de nuages enroulés en spirale, spécifique d'une dépression. Et au sens figuré, le terme désigne une forte influence qui entraîne irrésistiblement. Tout cela est présent dans ces dessins. Ils représentent des tunnels, à l’exception d’un seul, qui figure un paysage nocturne fendu par une route déserte, mais tous présentent des perspectives accélérées qui évoquent les courses poursuites des films d’action. Le regard est littéralement aspiré dans ces étonnantes accélérations qu’aucune anecdote ne vient distraire, puisque que rien d’autre n’apparaît que la visualisation de la vitesse elle-même sur ces voies de passage. Aucun autre véhicule en effet que l’efficacité virtuose du graphisme. Et la voûte des tunnels se fait ciel étoilé, pour nous transporter dans une autre dimension, des entrailles artificielles et sombres de la terre aux galaxies lumineuses de l’éther. (DD-2015)