Détail de l'œuvre
  • Pierre-André Ferrand (né en 1952, Genève (Suisse))
  • Torse
  • 1990
  • gesso sur toile de lin tendue sur châssis
  • 169.5 x 95 x 5 cm
  • n° inv. 01551

  • crédits photographiques: Serge Fruehauf
  • Pierre André Ferrand (*1952, Genève) étudie à l'ESAV entre 1975 et 1978 auprès de Chérif Defraoui. De 1980 à 1983, il gère avec Étienne Paul Marie Descloux un lieu nommé Apartment, où sont organisées des expositions, entre autres d'artistes alémaniques peu connu·e·s en Romandie, et où certaines recherches de la scène genevoise trouvent un espace d'expression. Entre 1985 et 2007, il séjourne longuement en Pologne – où il poursuit sa formation dans l'atelier de Jerzy Nowosielski, connu pour ses fresques et icônes religieuses – puis en Lituanie. Ces séjours s'inscrivent dans le temps et le lieu idéaux pour que l'artiste aille vers ce qui l'habite fondamentalement. En effet, Ferrand est avant tout peintre d'une foi profonde, un engagement absolu qui lui demande silence, calme et simplicité, des conditions réunies par ses choix existentiels. À présent depuis presque un demi-siècle, il emploie une pauvreté de langage en écho à sa spiritualité. Sa peinture, strictement sans figuration ni réellement abstraction, donne à voir un potentiel de contemplation et concentre une présence que la personne qui regarde pourra – si elle y est prête – percevoir. La couleur y est essentielle, malgré une palette réduite à quelques blancs et beiges, puis plus tard des rouilles, des bruns, des verts ou des ocres. En déposant des couches de peinture très fines sur la toile, il fait vibrer la surface qui dialogue avec la lumière et dévoile une gamme de tonalités particulièrement riche. En même temps que l'exploration de la couleur, Ferrand mène une importante recherche sur le châssis. Convexe, concave, arqué, présentant parfois des épaisseurs considérables, le châssis ouvre l'œuvre non pas à un caractère conceptuel ou réifié mais simplement à l'espace. Il permet de dépasser la surface stricte pour habiter quelque chose de plus vaste. Très attentif à la manière dont ses tableaux sont accrochés, l'artiste les arrange souvent à même le sol, appuyés contre la paroi, les faisant retentir contre – ou plutôt avec – des pièces au mur. Outre sur toile de lin, Ferrand dépose aussi sa couleur sur papier. Les deux présentent de temps en temps un événement sous la forme d'une fissure, due à une surtension de la toile ou à une surcharge d'humidité permettant une respiration. Celle-là advient parce qu’elle était, en réalité, déjà là. Elle montre, inévitablement mais sans amertume, la possibilité de la disparition de la toile, son détissage, son effilage. Cette conscience du vide, de l’œuvre à l’intersection du visible et de l’invisible, se manifeste également, de manière moins charnelle, dans les travaux sur papier.

    Réalisé en 1990, Torse est acquis par le FCAC en 1993. Il s'agit d'une œuvre au gesso finement appliqué sur la toile de lin, tendue sur un châssis trapézoïdal aux angles arrondis. Le titre de l'œuvre guide le regard et valide le mouvement cognitif identifiant une forme semblable à un tronc humain sans membres, simplifié à l'extrême. De multiples références culturelles et tout un pan de vestiges gréco-romains viennent à l'esprit, puis on se remémore leur continuité dans l'art chrétien et les nombreux torses meurtris et souffrants dont les fragments habitent lieux de culte, institutions muséales et composent le bagage visuel occidental. Ce Torse sobre et dépouillé communique une forme absolue dans l'économie de langage propre à l'artiste: le regard qui y sera porté pourra malgré tout être pluriel: celui de la reconnaissance ou celui, simplement, d'une constatation. (PK, 2023)

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